SOUVENIRS
 de notre séjour à VITRAC SAINT VINCENT (Charente) de septembre 1939 à septembre 1940

d'après le récit original de Jeanne SCHNEIDER (épouse Jung)

 

 

 

PARTIE 6

Le retour

 

Enfin, je vis un panneau sur lequel on pouvait lire : GARE DE ST DIZIER. En regardant dehors, je vis des soldats mais des allemands.

On reçut l'ordre de descendre et on nous emmena dans une grande salle où on voyait une grande photo du Führer. Trois soldats nous dirent que nous allions rentrer dans notre nouvelle patrie qui était désormais l'Allemagne. Ils nous défendirent à partir de ce moment de parler le français. "Pour dire bonjour, pour saluer, vous devez tendre la main droite au front et la tête haute vous direz « Heil Hitler. Nous allons vous ramener dans vos villages et  vous devez être fiers car le Führer va s'occuper de vous maintenant".

On nous fit rentrer de nouveau dans le train. Entre temps, quelques jeunes hommes qui avaient vu venir le danger, ont sauté dans un autre train qui repartait pour le Sud. D'autres qui voulaient faire la même chose ont été retenus par leurs parents. Le train nous conduisit jusqu'à Phalsbourg. Pourquoi, je ne le sais pas. Et là dans cette ville, nous fûmes abandonnés à nous même. Il fallait se chercher de nouveau un logement. Nous avons trouvé refuge dans une cabane au fond d'un jardin. Pour manger il fallait se débrouiller. Cette ville du côté des Vosges grouillait de soldats allemands qui défilaient le matin en chantant à tue-tête dans les rues. Nous étions là et nous ne savions pas ce que nous allions devenir. Après une ou deux semaines nous nous demandions si quelqu'un allait nous ramener dans notre village.

Finalement nous avons découvert une personne qui accepta de nous ramener à Siersthal avec une camionnette par trois ou quatre familles, je ne me souviens plus à quel prix. Et c'est ainsi qu'une famille après l'autre, nous regagnâmes Siersthal.

Mais là, la surprise fut grande. Les maisons étaient presque toutes indemnes mais tout ce qui était à l'intérieur, meubles, lits, vaisselle fourneaux... tout avait disparu ! Tout cela avait été transporté dans les forêts, à l'intérieur des bunkers ou abris pour les soldats français qui étaient derrière la ligne Maginot. Cela n'avait pas servi à grand chose vu que les Allemands étaient venus par la Belgique. La guerre pour nous, n'allait que commencer...

Trente ans plus tard, je pus pour la première fois revoir la Charente. J'étais si heureuse. J'ai enfin revu ce pont et le ruisseau à Vitrac dont j'avais si souvent rêvé, grâce à la famille Fogel René et Rosalie qui m'ont emmenée et que je remercie encore mille fois. J'ai aussi revu le Breuil. Quel événement : j'étais devant la porte, quelqu'un m'a ouvert, nous nous sommes regardés et nous nous sommes tout de suite reconnus. Nous sommes tombés dans les bras les uns des autres. Pas possible, quel bonheur ....

 

Vitrac à l'époque

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